Les mots sont de Montesquieu, « je ne suis pas étonné que ce roman, dont le héros est un fripon et l’héroïne une catin, plaise » et s’il plait encore aujourd’hui, c’est sans doute « parce que toutes les mauvaises actions du héros ont pour motif l’amour »!
Créé en 1974, l’Histoire de Manon par Kenneth MacMillan est un ballet qui permet au danseur de jouer la comédie, il y a tout ce qu’il faut d’effusions passionnelles, de scènes comiques, pour finir sur un pas de deux des plus tragiques…
Pourtant, rien de caricatural dans l’écriture du chorégraphe, MacMillan y fait preuve d’une grande finesse psychologique et d’un sens de la théâtralité affirmé. Inspiré par les héros mythiques de l’Abbé Prévost, il nous fait entrer dans le Paris de la Régence, où la bourgeoisie décadente s’enivre, triche au jeu, trompe dans les tripots d’une ville de tentations.
Les tentations, Manon ne sait y résister: tour à tour ingénue et sensuelle, adorable et amorale, responsable et victime, elle « a moins peur de la pauvreté qu’elle n’a honte d’être pauvre. La pauvreté à cette époque équivalait à une longue mort lente », excuse le chorégraphe.
Maupassant aussi se sent désarmé devant le personnage ambivalent de Manon:« Dans cette œuvre, si pleine de charmes et de perfidie instinctive, l’écrivain semble avoir concrétisé tout ce qui est le plus plaisant, le plus alléchant, et le plus infâme, de la créature féminine ! Manon est entièrement, complètement femme, comme elle l’a toujours été, comme elle l’est et comme elle le sera toujours. »
Revenons à l’histoire, l’occasion surtout de voir quelques extraits dansés par, entre autres (excusez du peu!), Sylvie Guillem, Isabelle Guérin, Manuel Legris ou encore Laurent Hilaire…
Acte 1 : Paris
Dans une auberge fréquentée par des actrices, des gentilshommes et des semi-mondaines, Lescaut, le frère de Manon, essaie de la convaincre d’épouser le riche Monsieur GM. C’était sans compter l’arrivée du Chevalier des Grieux, dont Manon tombe immédiatement amoureuse. Ils décident de fuir Paris avec l’argent que Manon a volé d’un autre soupirant.
Dans la seconde scène, Des Grieux est en train d’écrire une lettre à son père, quand Manon l’interrompt pour lui déclarer sa flamme. Il part poster la lettre, profitant de son absence, Lescaut arrive avec Monsieur GM. Ce dernier danse avec Manon, et lorsque Des Grieux revient, Lescaut le persuade de laisser Manon épouser le gentilhomme afin d’être à l’abri du besoin.
http://www.youtube.com/watch?v=RBPqeiiLzFg&feature=related
Acte 2 :
Monsieur GM donne une soirée, Manon est littéralement partagée entre la richesse de Monsieur GM et son amour pour Des Grieux. Celui-ce essaie de convaincre Manon de quitter la soirée mais celle-ci veut essayer de soutirer de l’argent à son prétendant. Ils sont obligés de s’enfuir quand Des Grieux est pris la main dans le sac, trichant allègrement aux cartes.
Manon et Des Grieux rejoignent leurs appartements, mais ils sont retrouvés par Monsieur GM et la police. Manon est arrêtée comme prostituée. Dans la bagarre qui s’ensuit, Lescaut est tué par la police.
(l’extrait qui suit est dansé par Sylvie Guillem, lors d’une soirée exceptionnelle à La Scala en 2011, elle a 46 ans… waou!)
Acte 3 : Nouvelle Orléans
Comme beaucoup de filles de mauvaise vie de l’époque, Manon est déportée à la Nouvelle Orléans. Son fidèle Des Grieux se fait passer pour son mari et parvient à la retrouver. Le geôlier a remarqué la grande beauté de Manon et lui offre la liberté contre son amour, mais Des Grieux le tue et fuit avec Manon dans les marais. Lors d’un grand pas de deux, ils se disent leur amour, loin de leurs désirs d’opulence, les forces de Manon commencent à l’abandonner, elle meurt dans les bras de son chevalier.
La première est samedi 21 avril.
À noter dans les différentes distributions, les deux étoiles fraîchement nommées, Ludmila Pagliero et Josua Hoffalt et le couple à la scène comme à la ville Nicolas Leriche et Clairemarie Osta (qui fera ses adieux dans ce rôle le 13 mai prochain).
Le ballet de MacMillan est écrit sur un pot-pourri de musiques peu connues de Jules Massenet, arrangées par Leighton Lucas. Pour mieux connaître ce compositeur, ne manquez pas les derniers jours de l’exposition « La Belle Époque de Massenet » jusqu’au 13 mai 2012 dans la bibliothèque-musée de l’Opéra Garnier.
Cette exposition accompagne les deux productions Massenet de l’Opéra de Paris: l’opéra en janvier et le ballet dont il est question dans ce billet. C’est qu’en 2012, on fête le centenaire de la mort de celui qui a dominé la vie lyrique de son temps, incarnant l’élégance et la sensualité à la française. Courrez-y!