Cela ne vous a pas échappé: Danse en Seine est de retour sur scène et pas sur n’importe laquelle: la scène ouverte aux compagnies amateurs de la MPAA!
Dimanche 27 octobre à 18h, la compagnie présentera Agatha (création 2013 – Bérangère Roussel), mais aussi Gueule de Loup de Christine Bastin, aux côtés de la compagnie Accords perdus. Sur demande de la MPAA, la chorégraphe a recréé pour 12 danseurs amateurs, cette pièce initialement conçue pour 5 danseurs professionnels.
Rencontre avec Christine Bastin.
Que raconte Gueule de Loup?
La pièce est une commande de la Biennale de la Danse de Lyon sur le thème de l’Espagne. L’Espagne que j’ai choisie, c’est l’Espagne des pauvres. Des écrivains comme Federico García Lorca ou Camilo José Cela m’ont beaucoup inspirée. J’avais envie d’y débusquer ce qui pouvait me toucher dans mon corps. J’y ai trouvé la corrida, le flamenco, qui sous des airs de folklore, sont au cœur de l’Espagne et font appel à une certaine brutalité, à de la sauvagerie. Le flamenco est ancré dans le sol, et c’est toujours étonnant de voir que ce n’est pas forcément la fille la plus jeune et la plus jolie qui sera touchée par le duende. Et la corrida… c’est incroyable qu’il existe encore aujourd’hui un rite barbare comme ça, où l’homme défie un animal énorme et dangereux, risque sa vie: on est proche du rite antique, au plus près des émotions archaïques.
Gueule de Loup a pour cadre une famille espagnole très simple, dont les membres peinent à trouver la joie, cherchent l’intensité sans avoir les moyens de la vivre. Dimanche, vous verrez la pièce initiale raccourcie de 25 minutes, transcrite pour 12 danseurs, alors qu’elle était écrite pour 5. Mais l’histoire de fond reste la même. Il y a des gens qui ont le vent mauvais, dont le destin est que tout foire, ils sont de ceux-là.
J’ai voulu décrire une corrida des pauvres, transcrire la joie, la violence, la clarté archaïque des êtres sans fioriture. J’ai poussé les danseurs au plus profond d’eux-mêmes, pour aller au plus près des personnages. Car j’y vois une vraie pièce de théâtre dansée. Il n’y a rien à voir avec la projection vers le public, c’est une histoire de la vie et de la mort.
Comment se situe cette oeuvre dans l’ensemble de votre répertoire?
C’est officiellement la 5ème pièce que j’ai créée. C’est une pièce très vivante. Elle date de 1992, elle a donc 21 ans aujourd’hui. Et si je n’ai pas l’impression qu’elle ait vieilli, c’est qu’elle cherche le jaillissement du mouvement en profondeur, comme si notre profondeur humaine ne bougeait pas avec le temps. Elle suit le cours de la vie: naître, aimer, mourir. Ce, de façon plus ou moins chaotique, dans la grâce, l’espérance ou la désespérance. Je me reconnais toujours beaucoup dedans.
En quoi est-ce différent de travailler avec des danseurs amateurs? changez-vous votre manière de transmettre?
J’avais douze danseurs devant moi. Les seules concessions que j’ai faites touchent à la durée de la pièce (raccourcie de 25 minutes) et au nombre d’interprètes (12 au lieu de 5 initialement). Je ne voulais pas faire un « sous Gueule de Loup ». J’ai tout fait pour qu’ils entrent dans leur rôle, comme je le fais avec des danseurs professionnels. La seule différence est que le corps est moins habitué à danser tous les jours, à mémoriser. Dans une compagnie, on ne fait que ça, on ne pense qu’à la création en cours. Alors qu’ici, à part la première semaine où nous avons pu répéter tous les jours, à raison de 6h par jour, chacun des danseurs mène une vie professionnelle en parallèle, on sent parfois que l’élastique se détend d’une séance à l’autre. Mais j’ai trouvé de très belles intériorités, une belle concentration. Eux avaient envie d’aller le plus loin possible et mon exigence a été la même. On s’est tous retrouvés autour de cet amour de la danse.
> Informations pratiques
Dimanche 27 octobre à 18h
MPAA : 4 rue Félibien – 75006 Paris
Entrée gratuite sur réservation (01 46 34 68 58 entre 14h et 18h)