Dimanche 28 avril, 15h : les adhérents Danse en Seine se retrouvent devant Chaillot pour démarrer une journée placée sous le signe de la danse. Avec la compagnie célèbre compagnie contemporaine israélienne, la Batsheva Dance Compagny. Au programme, le spectacle Deca Dance suivi d’un atelier dansé, atelier donné par le directeur artistique et chorégraphe de la compagnie en personne, Ohad Naharin. Gros coup de coeur ! Danse en Seine vous raconte cette sortie plus que spéciale.
« La folie côtoie la sainteté »
Ces quelques mots sont tirés de la saisissante et introductive phrase du spectacle « Deca Dance » du chorégraphe Ohad Naharin et préludent aux lignes de force des différents tableaux scéniques interprétés par les danseurs de la Batsheva. La compagnie de danse israélienne, mondialement reconnue, est revenue en France pour quelques dates sur les planches du Théâtre National de Chaillot dans le cadre d’un festival au thème évocateur des frontières.
Le chorégraphe israélien, dans Deca Dance, nous offre une série de ses meilleures scènes re-chorégraphiées. Si quelques talentueux quidams s’amusaient à imiter dans nos rues les convulsions des artistes de la Batsheva, nul doute qu’ils seraient immédiatement internés après une forte dose de sédatif. Mais sur la scène de Chaillot, les limites aux capacités de mouvement du corps humain semblent être repoussées par les contorsions des danseurs venus de terre sainte.
De la motion à l’émotion, de la pulsion à l’impulsion, Deca Dance alterne frappantes scènes de groupe à d’intimes solos, duos, et trios, accompagnés tour à tour de musiques tonitruantes, de classiques remixés, ou d’un silence sépulcral.
« Deca Dance » relève plus d’une danse en déca que d’une décadence. Les chiffres marquent leur cadence dans une danse des chiffres. Allusion à la gematria hébraïque ? Une numérologie mystérieuse se fait la voix des chorégraphies des corps, tantôt en base dix « deca », tantôt en 13. La culture juive transpire de l’esprit des corps, quitte à tomber dans quelques clichés scéniques trop connus des Israéliens.
Un chant traditionnel de la Haggadah, scandé lors de la Pâque juive, ouvre d’une voix épaisse la première et spectaculaire scène, où les danseurs se meuvent par treize fois en une houle assise d’un rythme impitoyable.
Plus que le mystère, c’est le mystique qui s’empare de la scène, par l’effroi ou la suavité du geste ; Somme toute 3000 ans de culture au service de la danse contemporaine. Au millénaire s’ajoute le moderne d’une culture israélienne urbaine et coloré, où le Tel Aviv pop et bourdonnant se fait tantôt amoureux, tendre ou pressant.
A la contraction des muscles glabres s’oppose une décontraction très israélienne du sens donné à la scène lorsque les danseurs y invitent des spectateurs pris par la main, brouillant ainsi le cloisonnement conventionnel entre la scène et le public, l’artiste et le spectateur, l’action et le regard.
Cette joie toute hassidique qui envahit alors la salle ferait presque oublier le niveau international du spectacle offert, chef d’œuvre technique autant qu’artistique, salué tant par la critique que le public ; il fut parisien et chanceux ce jour là.
En bonus, extrait vidéo à savourer sans modération :
Arno, pour Danse en Seine